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Mort du réalisateur et metteur en scène Marcel Bluwal - Le Figaro

Fou de théâtre passé par la télévision et le cinéma, cet amoureux des grands classiques s'est éteint à l'âge de 96 ans.

Il était l'un des derniers réalisateurs mythiques de l'âge d'or de la télévision. Le réalisateur et metteur en scène Marcel Bluwal, figure emblématique du conservatoire d'art dramatique de Paris, est décédé samedi à l'âge de 96 ans, a appris l'AFP dimanche auprès de son agent. L'homme de théâtre est décédé «paisiblement samedi matin» à Paris, a précisé son entourage. «Mon chagrin est immense, je lui souhaite un beau voyage, il a été un homme essentiel», a écrit sur Facebook l'actrice Ariane Ascaride, qui a été son élève.

Né à Paris le 26 mai 1925, de parents juifs polonais immigrés, Marcel Bluwal, a passé une partie de la guerre, 26 mois, caché chez le professeur de piano de sa mère. Après avoir suivi l'enseignement de l'École technique de la photo et du cinéma de la rue de Vaugirard, il entre en 1949 à la télévision, qui, aimait-il dire, était née la même année que lui (la première démonstration publique d'un système de télévision date de 1925, à Londres). Ses premières réalisations sont des émissions enfantines (Jeudi après-midi) puis il se lance dans l'adaptation télévisée de chefs-d’œuvre du théâtre et de la littérature.

Un adaptateur en chef

Lui qui se fait une haute idée de la mission culturelle de la télévision dépoussière sur les planches les plus grands auteurs : Le barbier de Séville, Le mariage de Figaro, Le jeu de l'amour et du hasard, Les frères Karamazov... Avec plusieurs dizaines d'adaptations à son actif, son nom est, depuis, resté attaché à l'âge d'or de la télévision des Buttes-Chaumont, aux côtés de Stellio Lorenzi (Jacquou le croquant), Jean Prat ou encore Claude Santelli.

Son adaptation du Dom Juan de Molière, tourné en 1965 avec Michel Piccoli et Claude Brasseur, en décors naturels vides de présence humaine, a marqué l'histoire de la télévision et est encore cité comme modèle d'adaptation d'une pièce pour le petit écran. «Je ne me suis jamais senti ni gourou ni intello», déclarait-il à Libération en 1994. «L'année d'après (Dom Juan, ndlr) d'ailleurs, j'ai enchaîné avec Vidocq, qui était le symbole de la vulgarité. Vous pensez: un feuilleton!». Ce Vidocq, avec Bernard Noël puis Claude Brasseur et Danièle Lebrun (qui deviendra sa femme), avait également remporté un succès considérable.

Claude Brasseur (Sganarelle) et Michel Piccoli (Dom Juan) en 1965, dans l'adaptation de Dom Juan par Marcel Bluwal, d'après la piece de Moliere. Gusman/Leemage

Boxer avec le fantôme des auteurs

Le théâtre télévisé n'était cependant pas son unique amour. Dans les années 1950, première véritable décennie de la télévision française, Marcel Bluwal propose, parallèlement aux dramatiques, la série Si c'était vous (1957), saluée par la critique, composée d'œuvres de fiction fondées sur des sujets sociaux, tels que les problèmes de logement d'un jeune couple, la fugue d'un adolescent... Dans les années 1980 et 1990, il réalise notamment Mozart, une série de 9 heures sur la vie du compositeur, Thérèse Humbert avec Simone Signoret, Les Ritals adapté du livre de Cavanna...

Puis Marcel Bluwal délaisse le petit écran, pestant contre une télévision devenue «un bête robinet à images». Au théâtre, il a signé plusieurs mises en scène remarquées, dont notamment Le Misanthrope (1968), Dom Juan revient de guerre (1975), Les fausses confidences (1982). Il a remporté en 2007 le Molière de la meilleure adaptation pour A la porte de Vincent Delecroix, avec Michel Aumont. Dans les années 1980, il a également réalisé plusieurs mises en scène d'opéra en Allemagne (Cosi fan tutte, La Flûte enchantée...). Ses incursions au cinéma - comme Carambolages avec Louis de Funès (1963) ou Le plus beau pays du monde (1998) avec Claude Brasseur - ont été plus modestes et ont reçu un accueil mitigé.

Très engagé à gauche, membre du PCF de 1970 à 1981, Marcel Bluwal avait conservé jusqu'au bout sa fougue et son enthousiasme. Sur un plateau, «il a toujours l'air d'être sur un ring. Il boxe avec l'idée, avec le fantôme de l'auteur, avec l'acteur...», disait de lui Claude Santelli. En 2008, après 13 ans d'absence à la télévision, il a dirigé la mini-série À droite toute consacrée à la montée de l'extrême droite en France durant les années 1935-1937 à travers la formation de la Cagoule, organisation clandestine qui fomentait le renversement de la République.

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