Après onze jours de compétition effrénée, où ont brillé les tests salivaires, les amours saphiques et les surprises de dernière minute, le suspense reste entier sur le palmarès décerné samedi soir.
Clap de fin sur le Festival de Cannes le plus gargantuesque qu'il soit. Comme pour se venger de l'année blanche engendrée par le coronavirus, vingt-quatre films étaient en lice pour la palme d'or, et plus de 150, en tout, projetés en onze jours aux critiques, producteurs et cinéphiles du monde entier. Le jury de Spike Lee aura fort à faire pour décerner les sept prix obligatoires : la palme d'or, le grand prix, les prix de la mise en scène, du jury, du scénario et les prix d'interprétation féminine et masculine. Difficile au terme d'une compétition effrénée, où les longs métrages français étaient présents en masse avec huit productions, de discerner et pronostiquer ce qui pourrait remporter l'adhésion du réalisateur afro-américain de Do The Right Thing , très militant, et de ses camarades tels que Mylène Farmer, Tahar Rahim, Maggie Gyllenhaal ou Mati Diop.
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Enfermé, le groupe passera samedi quelques heures de débats que l'on imagine enflammé dans une villa cannoise, comme le veut la tradition. Quand tout se passe bien, la liste des heureux élus est bouclée en milieu d'après-midi. Les décisions sont prises à la majorité absolue des votants aux deux premiers tours de scrutin et à la majorité relative aux tours suivants. Seront-ils le premier jury à décerner une palme d'or à une femme depuis deux décennies ? Le triomphe de Jane Campion et de sa Leçon de piano paraît si loin. Rendez-vous à 19h15.
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Une fin de festival très solide
Comme lors de la dernière édition en 2019 avec Parasite, des favoris de dernière minute sont en mesure de chambouler la donne. Présenté vendredi, Nitram de Justin Kurzel, aborde le sujet du contrôle des armes à feu. Il a fait sensation. Le long-métrage revisite la genèse d'une fusillade en Australie, qui avait fait 35 morts en 1996, en se concentrant sur le profil du jeune tireur. Son interprète Caleb Landry Jones est un prétendant sérieux au prix du meilleur acteur. Il a un rival puissant en la personne de Simon Rex, son compatriote, qui brille dans son rôle d'ex-star du porno revenu dans sa ville natale pour un nouveau départ (Red Rocket de Sean Baker). Spike Lee a été vu en train d'échanger quelques mots avec le comédien.
Pour la palme, le chouchou des journalistes du monde entier s'appelle Drive My Car, du Japonais Ryusuke Hamaguchi. Ce film-fleuve à l'esthétisme éblouissant, adapté d'une nouvelle de Haruki Murakami, met en scène deux êtres hantés par le passé. Un metteur en scène de théâtre traumatisé par la mort de son épouse et une jeune femme effacée qu'on lui assigne comme chauffeur. Tous deux se résignent à faire face, ensemble, à leurs fantômes. La Hongroise Ildiko Enyedi a également marqué les esprits, mercredi, avec L'Histoire de ma femme, l'un des films les plus léchés de la compétition, une somptueuse histoire d'amour et de marin avec Léa Seydoux, acclamé par nos critiques.
Le cinéma aime les femmes qui s'aiment
Les propositions radicales de mise en scène qui ont clivé les exégètes ont été légion : l'opéra-rock Annette de Carax, La Fièvre de Petrov du cinéaste russe assigné à résidence Kirill Serebrennikov, le rêve éveillé du Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul, palme d'or en 2010, Souvenir tourné en Colombie, le déroutant Titane de Julia Ducournau, qui a provoqué quelques malaises en salle… Jacques Audiard a aussi surpris ses connaisseurs avec son romantique Les Olympiades, récit sur le polyamour tourné en noir et blanc dans le 13e arrondissement de Paris.
Les Olympiades est un des nombreux aspirants la palme à mettre en scène des cunnilingus (recensés par certains critiques facétieux) et amours saphiques. Outre Benedetta de Paul Verhoeven, qui retrace l'amour enflammé entre deux nonnes dans un couvent du Moyen Âge, figure le couple formé par Marina Foïs et Valeria Bruno-Tedeschi dans La Fracture. Dans Compartiment N°6 du Finlandais Juho Kuosmanen, l'amour entre femmes, là encore normalisé, est simplement une des possibilités offertes par la vie, à travers une conception «fluide» de l'amour et de la sexualité.
Coup de foudre à Grünerløkka
Compartiment N°6 n'est pas le seul film scandinave à avoir réveillé les festivaliers. Julie (en 12 chapitres), fine observation des mœurs amoureuses de la jeunesse d'aujourd'hui par le Norvégien Joachim Trier, se place dans la lignée de l'acerbe série Fleabag. Il a provoqué un coup de foudre collectif pour son héroïne, Renate Reinsve, 33 ans.
Malgré le rebond du variant delta, la pandémie n'a pas gâché les retrouvailles du 7e art. Même rapetissées et raréfiées, les fêtes légendaires de la Croisette étaient là. Décriés par certains participants étrangers (notamment américains), obligés de donner un extrait de salive dans des tubes toutes les 48 heures, les tests répétés n'ont pas détecté de cluster. Tant mieux. Les nombreux clichés de trop nombreux spectateurs enlevant leur masque pendant les projections avaient fait le tour de la planète plus vite qu'une starlette trébuchant sur les marches. Conscients des enjeux et de l'image pour le festival, ses organisateurs n'ont eu de cesse de rappeler les récalcitrants à l'ordre. Cannes vaut bien un masque.
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