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Brahim Bouhlel : de «Validé» à la prison marocaine, comment une mauvaise blague a viré au cauchemar - Le Parisien

Atterré. Sidéré. Au lendemain de la condamnation de Brahim Bouhlel à huit mois de prison ferme au Maroc à la suite d’une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, l’entourage du comédien de la série « Validé » était encore sous le choc ce jeudi. Tous le concèdent. La blague était de très mauvais goût. « Nulle », « choquante », cette vidéo tournée à Marrakech, dans laquelle l’humoriste de 25 ans accompagné de l’influenceur franco-marocain Zbarbooking et de l’acteur français Hedi Bouchenafa se filment aux côtés de trois enfants marocains en proférant des insultes sur eux et leurs mères, est unanimement décriée. Mais beaucoup jugent la sentence « disproportionnée ».

« Cette histoire, c’est « Midnight Express » (NDLR : film dans lequel un touriste, transportant de la drogue, vit l’enfer de la prison en Turquie) », souffle un proche, également comédien, qui souhaite garder l’anonymat, vu le caractère très sensible de l’affaire. « C’est une grosse bêtise, il a oublié qu’il n’était pas en France et qu’il ne pouvait pas tout dire. Mais le pays du festival Marrakech du rire doit pouvoir tolérer des dérapages », estime de son côté Karim Kachour, gérant du Paname Art Café, le temple du stand-up parisien, qui a pris Brahim Bouhlel sous son aile quand il a démarré.

VIDÉO. Indignation au Maroc après la diffusion d’une vidéo « parodique » de l’acteur Brahim Bouhlel

« Même ses parents ont été menacés »

Depuis la publication, début avril, de la vidéo parodiant (très) maladroitement un reportage télé sensationnaliste, la polémique n’a cessé d’enfler. Au Maroc, les agissements du trio ont choqué. Sur les réseaux sociaux, l’humoriste se retrouve inondé de messages virulents. La marque Adidas a également pris ses distances, s’engageant « à reconsidérer sa collaboration avec lui ». Visiblement dépassé, l’acteur s’est excusé à plusieurs reprises, dans des vidéos où il apparaît, grave, comme abasourdi.

En détention provisoire depuis deux semaines, Zbarbooking et lui étaient poursuivis pour « diffusion d’une vidéo d’une personne sans son consentement » et « détournement de mineur ». Quant à Hedi Bouchenafa, le troisième protagoniste, il a regagné la France, mais serait visé par un mandat d’arrêt international.

La carrière de l’humoriste originaire de région parisienne, sous le feu des projecteurs depuis le succès de la série de Canal +, prend ainsi un violent coup d’arrêt. « Il a quatre ou cinq films en projet, mais là, il ne va plus travailler », souffle un ami humoriste, qui souhaite garder l’anonymat. C’est justement pour un tournage, celui du prochain film de Mohamed Hamidi ( « La Vache ») avec Kad Merad, que Brahim Bouhlel se trouve actuellement au Maroc. « Il va très mal, nous confie cet ami, évoquant les conditions de détention. Sa sœur a pu se rendre sur place. C’est très compliqué pour tout le monde. Cette polémique a pris des proportions hallucinantes. Même ses parents ont été menacés et ont reçu des appels anonymes. »

Repéré par Franck Gastambide

Brahim Bouhlel a grandi à Chelles, en Seine-et-Marne, dans une famille sans histoires. Son père est algérien, sa mère tunisienne. Son destin bascule le jour où il croise le chemin du réalisateur Franck Gastambide. Dans sa série « Validé », une plongée dans le monde du rap, le jeune homme au regard noir attendrissant incarne l’un des personnages principaux : Brahim dit « Chinois », le pseudo-cousin de Clément, héros incarné par le rappeur Hatik. Omniprésent à l’image dans la saison 1, il est aussi un des personnages principaux de la saison 2, déjà tournée entre Paris et Marseille et qui était censée arriver sur Canal + avant l’été.

Franck Gastambide, devenu un ami, a fait un vrai pari en choisissant ce jeune inconnu qui s’est d’abord illustré dans des vidéos sur Instagram. « Pour ces trois acteurs qui sont dans la série, il ne fallait pas que l’on se plante, nous racontait Franck Gastambide, au moment de commenter le succès de la première saison. D’habitude, je travaille avec ma bande de potes et là ce sont des mecs que je ne connais pas, donc on a mis beaucoup de temps à les choisir. » Pour le réalisateur de « Taxi 5 », l’enjeu est énorme. Première série sur le rap français, il se sait attendu au tournant. Et le rôle de Brahim Boulhel, celui du bon pote « bonne pâte », est central.

Un petit nom dans le milieu du stand-up

Gastambide le repère par hasard, dans une vidéo postée sur Instagram par l’humoriste Hakim Jemili. « Il a demandé à Hakim : « C’est qui le petit gros à lunettes ? Envoie le moi » », nous confiait en mars 2020 Brahim Bouhlel, en racontant son casting. Alors âgé de 24 ans, il rêve de cette opportunité, lui qui n’a jamais été devant la caméra, habitué à l’écran de son smartphone où il teste son humour dans des mini-vidéos humoristiques. Finalement, il passera les cinq tours du casting. Croyant l’affaire perdue, il casse même la puce de son téléphone et change de numéro, de rage. Mais c’est finalement Hatik qui lui annoncera qu’il a été pris. Il appelle alors Gastambide pour vérifier. « Et là, on était comme des fous, cela faisait trois semaines qu’on le cherchait partout », s’amusait alors le créateur de la série.

Avant ce rôle, Brahim Bouhlel s’était fait un petit nom dans le milieu du stand-up. En 2014, il remporte le Chelles Battle Comedy, un tremplin d’humour de sa ville. Une passion qu’il mettra de côté un temps pour reprendre ses études en licence d’électrotechnique. Puis il vient tenter sa chance sur les plateaux de stand-up parisiens, comme la scène ouverte du Paname Art Café. « On a tout de suite compris qu’il était doué, se souvient Karim Kachour. Il est très drôle, très bon comédien, particulièrement pour imiter les différents accents. Pour moi, c’est un artiste de la nouvelle génération, un touche-à-tout. »

« Cette affaire va changer les choses chez les humoristes, prévient une professionnelle du milieu. Certains pensent qu’on peut faire de l’humour avec tout, tout le temps. Ce genre d’histoire montre que non, ce n’est plus jouable, qu’il faut faire attention, que la parole a un poids. Et ça, c’est peut-être une bonne chose. »

Demande de mise en liberté

Ce jeudi soir, sur le plateau de Cyril Hanouna, l’avocat de Brahim Boulhel et de Zbarbooking (« on lit partout qu’il est influenceur mais, non, il travaille dans la musique, le rap », a tenu à préciser son défenseur) annonçait qu’une demande de mise en liberté serait examinée lundi et qu’un procès en appel pourrait se tenir d’ici un mois. « Cette vidéo, c’est un procédé comique consistant à incarner un personnage vulgaire et cynique, comme Coluche qui jouait un policier raciste et alcoolique, dans le même esprit. Là, il y a une incompréhension totale, c’est complètement raté, mais je pense qu’il est important qu’on voit quelle était l’intention, qui était de dénoncer», a indiqué Me Charles Morel, d’abord appelé Jean-Jacques Morel par Cyril Hanouna et dont une photo erronée a été diffusée à l’écran.

« Cette vidéo, dans la compréhension qui en est faite au premier degré, est contraire a tout ce qu’il (Brahim Boulhel) est. Il est jovial, généreux, il prend soin des autres, dans l’empathie, professionnel, ponctuel, il fait l’unanimité. Il y a un fossé entre un mauvais délire et une menace sur l’intégrité physique des personnes, a encore précisé l’avocat. J’aimerais que tous ceux qui jugent, qui condamnent fassent leur examen de conscience ou un effort de mémoire, sur ce qu’ils faisaient, eux, à 24, 25 ans entre copains, en ayant bu un coup, ce genre de pitrerie délirante. La seule chose, là, c’est que ça été filmé et diffusé. L’intention comique était là, c’est raté. Ils sont traumatisés durablement. »

En cas de peine définitive, Me Charles Morel a précisé que la question du transfèrement se poserait ensuite pour que l’exécution de la peine se fasse en France.

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